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Météo : Janvier sera-t-il sec ?

C’est en train de devenir le marronnier du mois de janvier, chaque année plus fort, le fameux dry january, le mois sans alcool. Que cette idée vous énerve au plus haut point ou que vous soyez adepte inconditionnel, impossible d’être passé à côté car le battage médiatique et le suivi individuel se fait chaque année plus fort.

Je ne vais pas débattre ici du bien-fondé ou non de ce mouvement.

Plus que le dry january en lui-même, c’est l’évolution du rapport à l’alcool qui est intéressante en tant que caviste. Réfléchissons global. Aujourd’hui, en France, 20% de la population adulte ne boit pas du tout d’alcool. La part des personnes qui consomment du vin quotidiennement (le fameux verre pour accompagner le repas) est passée à 11%. Les populations les plus jeunes sont les plus concernées par cette baisse de la consommation avec un très net désintérêt pour les boissons alcoolisées chez les moins de 30 ans. Le vin est la première boisson touchée.

Plus proche de nous, on constate un rajeunissement progressif de la clientèle de la Cave. Je suis convaincu qu’une baisse de la consommation d’alcool ne peut qu’être bénéfique globalement aux cavistes qui, comme nous, axons sur la qualité plutôt que la quantité.

Depuis mardi (mois de janvier donc), environ 1/4 des personnes qui entrent dans la Cave viennent exclusivement ou en partie demander des boissons sans alcool. La tendance est en très nette hausse.

Face à l’ensemble de ces constatations, trois positions peuvent être adoptées.

  1. Ne rien changer. On vend de l’alcool, c’est notre métier. Tant pis pour celles et ceux qui n’en boivent pas. Après tout, un végétarien ne va pas chez le boucher.
  2. Hurler, se plaindre, critiquer ces gens qui ruinent la culture française, n’ont aucune notion de bien-vivre. Faire comme je vois beaucoup sur les réseaux, critiquer un monde woko-bobo-écolo délirant qui va nous mener à la perte de nos traditions viticoles. Et tant qu’à faire, attraper un buveur de flotte, l’attacher à une table et lui mettre du bon jaja dans un entonnoir, qu’il comprenne ce qui est bon. Ca c’est être Français, oui ! Et puis une côte de boeuf sans pinard, c’est d’une tristesse…
  3. Et si notre métier était plutôt d’accompagner les gens à bien boire, quel que soit leur choix de boisson ? Leur proposer des produits de qualité, dûment sélectionnés, adaptés à leurs envies et limitations diverses ?

Le propos peut paraître caricatural, mais, honnêtement, quand je vois la réaction de nombreux acteurs de la filière qui ne veulent proposer comme seule boisson non alcoolisée que du jus de pomme ou du jus de raisin, et sinon, les gens n’ont qu’à pas nous emmerder et boire de la flotte, je me demande si je suis si loin de la réalité…

Et si on ouvrait nos œillères pour réellement rechercher des boissons non alcoolisées qualitatives, produites avec soin, adaptées à tous les goûts (peu ou pas de sucre notamment) et qui peuvent fonctionner avec délices en accords gastronomiques ?

Ne rêvons pas : la tendance est réelle et ce n’est pas en se plaignant que tout part à vau l’eau ma p’tite dame, que les jeunes ils savent plus boire, qu’on va l’inverser (et le faudrait-il ?) et qu’on va attirer les-dits petits jeunes dans nos établissements.

N’est-on pas avant-tout vendeurs de plaisir et de convivialité ? J’avoue que reléguer les personnes ne buvant pas d’alcool à l’eau (et au pain, pour peu que ces imbéciles-malheureux aient en plus le mauvais goût d’être vegans) ne me semble pas franchement d’une convivialité folle… Bien accueillir, bien servir, être aux petits soins, à l’écoute des envies et besoins de ses hôtes, et si c’était ça, finalement le vrai savoir-être ?

Je suis convaincu depuis longtemps des possibilités des boissons sans alcool dans leur immense variété avec la gastronomie. Avez-vous déjà essayé du thé fumé avec de la raclette ? Cela fonctionne peut-être mieux que n’importe quel vin du Jura ou n’importe quelle bière ! Les accords thé-gastronomie sont d’ailleurs assez magiques, mais à force d’essais et de résistance rencontrée, j’ai bien du me résoudre au fait que notre civilisation n’était pas encore prête à franchir le pas.

Tant pis, tant mieux ! Nous partirons donc en quête de nouveaux produits sans alcools ayant un vrai intérêt, ne cherchant pas forcément à copier les boissons alcoolisées existantes (le problème du vin désalcoolisé rarement ne serait-ce que buvable…), mais ayant une vraie identité, une vraie philosophie et une approche respectueuse du produit !

En attendant, nous avons déjà des jus de pomme et de raisin produits par nos paysans, des bières sans alcool, des tonics et ginger beers de compet’, des sirops à la délicatesse infinie et même des sodas très très peu sucrés.

Mais on va bosser pour élargir tout ça avec notre exigence habituelle, avec pour objectif d’arriver à une grosse trentaine de références variées, pour tous les goûts, tous les plaisirs. 

Et toute l’année, pas que en janvier pour suivre une tendance !