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Changer de Rôle

Lorsque Patrick, la semaine dernière, me fait lire son texte de sortie de scène, deux choses me touchent particulièrement : son goût pour la mise en scène et son attachement à la transmission. Étant moi-même comédien d’improvisation théâtrale – j’ai eu le plaisir d’avoir certaines et certains d’entre vous comme spectateurs au spectacle « ImproVIN’zons » sur le vin – il va de soit que la métaphore filée du réalisateur/metteur en scène m’a beaucoup parlé.

Le théâtre porte en lui des valeurs qui me semblent particulièrement importantes en ce jour où je me vois prendre la responsabilité de mettre en scène l’Acte II de la Cave de Bacchus.

L’Acte I a fait le plus difficile : poser les fondations, construire, esquisser les développements, et même bien plus que cela en fait ! L’Acte II, à côté, semble simple. Et, de fait, en partant sur des bases aussi solides, continuer l’histoire sera une partie de plaisir. Mais j’aime à penser qu’il reste des enjeux à développer, des histoires à raconter, de nouvelles saveurs à partager. Après tout, nous n’en sommes encore qu’au début de l’histoire !

Prendre en compte et proposer

Il existe une notion fondamentale en théâtre d’impro qui me semble pouvoir être appliquée à bien des champs de la vie : prendre en compte ce qui nous arrive et réagir en proposant une réponse. Ne pas faire comme si le monde autour de nous n’existait pas et que nous étions dans un microcosme auto-centré et indépendant. S’adapter, toujours, et aller au-delà : proposer, construire, innover.

C’est ce qu’a toujours fait Patrick, et ce jusqu’aux derniers jours de sa présence à la Cave ! Il n’y a pas une semaine, nous étions encore en train de discuter de futurs projets dans lesquels il se projetait volontiers alors même qu’il savait qu’il allait tirer très bientôt sa révérence !

Mise en place d’un salon de caviste réunissant producteurs et buveurs – créant quelques émules en France ! Création d’un site internet dès la fin des années 1990, alors que la technologie était encore balbutiante. Cours de dégustation originaux. Création de la Cavépargne. Adaptation à de nouvelles situations, la dernière étant le Covid auquel il a bien fallu répondre par de l’innovation… Patrick n’a jamais considéré avec fatalisme une situation. Au contraire, il a toujours vu ces moments comme une occasion de s’adapter, d’innover, de proposer quelque chose de nouveau.

Il va de soit que cette qualité doit être reprise. Les nouveaux enjeux sont nombreux, à commencer par l’importance grandissante que prend chaque jour l’interface numérique. Il va falloir à la Cave de Bacchus l’imagination, l’audace et la réactivité pour s’y adapter. Sans pour autant y perdre notre identité et que nous sommes un commerce de proximité résolument orienté vers le lien, le partage et l’humain.

Lâcher Prise

Ce n’est donc pas à une simple copie de l’Acte I auquel aspire ce nouveau moment de l’histoire de la Cave, mais bien à une continuité, avec ses nouveautés, ses originalités, ses tentatives que j’espère fructueuses !

Bien sûr, au menu, les grandes lignes seront suivies et respectées ! La gamme telle qu’elle est me plaît et me correspond, il n’y aura donc pas de bouleversement de ce côté là (j’entends d’ici nos fournisseurs pousser un « ouf » de soulagement !). Des nouveautés, bien sûr, mais comme il y en a toujours eu depuis 26 ans !

De même, le grand moment de l’année qu’est le salon est bien entendu maintenu ! C’est une grande fête, un moment de rencontre et de partage, où tout notre travail de caviste prend son sens. Je serais extrêmement attristé à l’idée d’abandonner cela ! Je peux donc d’ores et déjà vous dire rendez-vous les 6 et 7 novembre 2021 à la Ferme Quentel, si Covid le veut. Nous en profiterons pour marquer la transmission comme il se doit !

Mais les idées germent également et continuité ne veut pas dire immobilisme accroché au passé ! Lâchons prise en restant cohérents avec ce qui a été fait !

Tout n’est pas encore en place, mais il y aura dans la première partie de 2022 de gros travaux à la Cave afin de donner un coup de frais ! Renforcer la boutique comme lieu d’échange, de rencontre et de convivialité me tient particulièrement à cœur. Nous vous tiendrons au courant de l’avancée des choses.

Et il y a toutes ces idées, toutes ces animations, tous ces partenariats que la période guère propice à la bamboche ne favorisent pas franchement. Mais elles sont là, dans un coin, en train de mûrir tranquillement, afin de pouvoir être dégustées quand ce sera possible !

En tout cas, chaque changement, chaque nouveauté n’a qu’un seul but : renforcer le lien avec ceux qui sont au cœur de nos pensées quotidiennes en tant que cavistes. Les clients.

Bienveillance

Car le centre de notre métier de caviste est avant tout le contact avec vous, la clientèle. Le conseil, toujours, que ce soit pour une bouteille à 4€ ou un grand-cru bourguignon. Accorder à chacune et chacun le temps et l’écoute nécessaire, sans préjugé. En étant absolument bienveillant et mû seulement par la volonté d’accompagner et de faire plaisir. Ne pas imposer ses goûts.

Accueillir avec bienveillance chacune des personne qui entre dans la Cave, respecter ses goûts, son individualité, ses spécificités, son humeur de l’instant même !

Patrick a toujours insisté sur un point fondamental : il faut aimer ses clients. On ne fait pas le métier de caviste juste par passion du vin. Ni même par seule volonté de partager sa passion.

Il faut aimer chacune des personnes qui fait l’honneur de passer la porte de la boutique. Les discussions portent sur le vin, la gastronomie, mais peuvent également aller au-delà de ce petit lien. Après tout, le vin n’est-il pas partage ? La pluie et le beau temps, certes. Mais parfois au-delà, des liens se tissent et de belles rencontres se font, qui se poursuivent autour d’une bouteille.

Un vin est tellement meilleur partagé !

Écoute

Et si c’était là le cœur de la réussite ? L’écoute. L’écoute de ce qui a été fait auparavant, afin de respecter la trame narrative et ne pas bouleverser le cours de l’histoire. L’écoute des clients, au quotidien, afin de les conseiller au plus près de leurs attentes. L’écoute du vin, de la bière, des spiritueux, de l’épicerie, bref, de nos produits et de leurs producteurs afin de sélectionner avec précision et attention ce qui pourra bientôt vous régaler.

Cette écoute n’est pas qu’auditive, elle est éminemment pluri-sensorielle, devant parfois laisser de côté l’intellect. Car oui, choisir un vin, si cela est rationnel, doit correspondre à un besoin dans la gamme, à un goût précis, avoir un rapport qualité/prix satisfaisant, etc, etc, c’est avant tout une affaire de plaisir ! De celui qui se ressent si l’on sait écouter son corps, si l’on sait écouter le vin et ce qu’il a raconter, ses énergies, les émotions qu’il inspire, le lieu qu’il transpire, la météo qu’il illustre…

Je suis chaque jour surpris de m’être laissé aller dans cette voie. Je suis un cérébral pur. Quelqu’un qui intellectualise tout et n’importe quoi. Et pourtant, ma passion, mon quotidien, ce qui me porte, est profondément sensitif. Donc oui, écouter encore et toujours est peut-être la clef du succès !

Transmission

Nous y arrivons, enfin. Le moment fatidique, celui du passage de témoin, de la transmission. Tu as raison Patrick d’aimer ce mot de transmission. Car si aujourd’hui la transmission est matérielle, elle l’a été, l’est et sera bien plus que cela.

Dans une vie d’avant le vin, j’ai été professeur d’histoire-géographie. Par vocation, bien sûr. Par l’envie de transmettre, par le goût d’apprendre, par cette volonté que le passé ne reste pas lettre morte et continue de vivre, relu et réinterprété par le présent.

En devenant caviste, c’est cette notion de transmission qui est redevenue centrale. Car, au fond, qu’est ce qu’un Grand vin si ce n’est la transmission liquide et émotionnelle d’un terroir, de la météo d’un millésime et du savoir faire d’une vigneronne ou d’un vigneron ?

Et qu’est ce que le métier de caviste si ce n’est celui de passeur, d’intermédiaire entre le vigneron et le buveur ? A chaque bouteille choisie, à chaque bouteille conseillée, j’espère transmettre une manière de travailler, un lieu, une gueule, une émotion, un ressenti, bref, aller au-delà du simple vin-aliment.

Et de la transmission à l’apprentissage, il n’y a qu’un pas. À ce niveau, je ne peux que remercier Patrick qui m’a, justement, tant appris. Je suis arrivé à la Cave de Bacchus, de retour sur mes terres finistériennes, il y a bientôt cinq ans. Tout jeune caviste auréolé d’une année de formation, jeune chien fou (j’espère n’avoir pas trop perdu cet aspect !) un peu idéaliste, parfois naïf, souvent maladroit.

Si aujourd’hui la transmission de la Cave de Bacchus se fait aussi sereinement, c’est aussi parce qu’en moi, dans ma manière de travailler, d’envisager le métier de caviste, il a de moi, bien sûr. Mais il y a aussi beaucoup de Patrick ! Merci mille fois à lui !

La Cave de Bacchus, Acte II, ça commence aujourd’hui, avec beaucoup d’avant. Avec de nouvelles idées aussi. Et surtout, avec une nouvelle tête ! Car il est d’usage qu’au début de l’Acte II de nouveaux protagonistes viennent mettre leur grain de sel à l’histoire. Le nouveau protagoniste, c’est ici Arnaud qui rejoint la Cave aujourd’hui. Tout droit venu de sa Touraine natale, il en connaît un rayon niveau vin, et pas que ceux de Loire, soyez rassurés ! Il saura, j’en suis sûr, participer à écrire la suite de l’histoire avec nous !

Au plaisir de vous retrouver très vite en boutique, sur le salon les 6 et 7 novembre ou ailleurs, un verre à la main j’espère !

Simon